24 mai 2023 - 07:00
Saint-Valérien-de-Milton
La restauration du pont Paré divise
Par: La Pensée de Bagot

Le citoyen engagé Réal Deslandes, le conseiller municipal Jules Normandin, le conseiller municipal Luc Tétreault, le maire Daniel Paquette, le chef de pompier et conseiller municipal Sylvain Laplante et la représentante de l’UPA Cindy Beaudry. Photo François Larivière | La Pensée ©

Le citoyen engagé Réal Deslandes, le conseiller municipal Jules Normandin, le conseiller municipal Luc Tétreault, le maire Daniel Paquette, le chef de pompier et conseiller municipal Sylvain Laplante et la représentante de l’UPA Cindy Beaudry. Photo François Larivière | La Pensée ©

« On est en faveur de la protection du patrimoine, mais à quel prix? », s’interroge le maire de Saint-Valérien-de-Milton, Daniel Paquette. La Municipalité entend effectuer une offensive auprès de Québec pour demander une reconstruction complète du pont Paré. Le ministère des Transports du Québec (MTQ) considère toutefois ce pont comme une infrastructure à un potentiel élevé patrimonial, ce qui nécessiterait plutôt une réparation partielle dans un souci de préservation.

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Cette solution ne permettrait toutefois pas d’augmenter la capacité portante de l’infrastructure qui enjambe la rivière Noire sur le 10e Rang. Les camions lourds et la machinerie agricole ne pourraient donc pas y circuler. Pour de nombreux agriculteurs, cela signifie d’effectuer un détour d’environ 7 km pour se rendre au plan de séchage à proximité. Cette installation connaît une croissance marquée depuis plusieurs années au point où elle a reçu près de 25 000 tonnes de grains l’année dernière. Une simple préservation signifie aussi que les camions de pompiers ne pourraient y circuler ni les camions de déneigement.

Appuyée par l’UPA de la Montérégie et la Municipalité de Saint-Liboire, Saint- Valérien-de-Milton compte interpeller le député de Johnson, André Lamontagne, et la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, afin d’exiger une reconstruction du pont. Les membres du conseil de la MRC des Maskoutains s’étaient montrés en faveur d’une simple restauration en 2020, mais ont changé leur fusil d’épaule en mars dernier en appuyant la Municipalité dans ses démarches. Les élus sont aussi appuyés par une pétition signée par près de 300 citoyens.

« Tant qu’à investir autant d’argent, ce qu’on demande, c’est de reconstruire un pont qui conserverait son cachet patrimonial, mais qui aurait une capacité portante répondant aux besoins d’aujourd’hui. Réparer le pont ou le reconstruire, ça va coûter sensiblement la même chose », affirme le conseiller municipal Luc Tétreault.

« Si, au bout de deux ans, on a le même pont avec les mêmes dimensions, on ne sera pas gagnants. Si on se fie au pont construit à Acton Vale, le pont a été reconstruit depuis longtemps avec les anciennes dimensions. Il y a quand même des véhicules non autorisés qui sont passés dessus. Ça a fait en sorte qu’il a été fermé deux fois. À ce jour, il est toujours fermé. Si ça prend un peu plus temps pour que les camions puissent passer, on va être gagnants quand même », poursuit la représentante du syndicat de l’Union des producteurs agricoles (UPA) des Maskoutains Nord-Est, Cindy Beaudry.

Potentiel patrimonial

Le pont Paré en est un de type « Baltimore ». Il a été construit en 1920 en même temps que le pont du rang de l’Égypte par l’entreprise MacKinnon Steel Company Limited. Le MTQ a interdit l’accessibilité aux camions lourds en 2012 avant de finalement le fermer complètement à la circulation en 2014. Le ministère avait annoncé les travaux de réparation en 2019-2020, mais ils n’ont jamais vu le jour en raison de la pandémie.

« Ce pont possède un intérêt patrimonial élevé, particulièrement en raison du type d’infrastructure qu’il représente. Ce type de structure à poutres triangulées en acier à tablier inférieur est peu répandu au Québec et celui-ci serait le seul exemplaire en Montérégie. L’ancienneté de la structure, la renommée de son constructeur ainsi que son degré d’authenticité supérieur contribuent également à son intérêt patrimonial », explique la porte-parole du MTQ, Marie-Michelle Pilon.

En 2021, la MRC des Maskoutains a tenté de citer patrimonial ce pont, mais s’est heurtée à un refus du ministère de la Culture et des Communications (MCC). L’infrastructure possède toutefois un intérêt patrimonial élevé. Par le biais d’échanges courriel avec la MRC, dont nous avons obtenu copie, la Direction de la Montérégie du MCC affirme considérer d’ajouter une protection légale si le pont était menacé.

« Le classement est une mesure de protection accordée de manière exceptionnelle et elle n’a pas été utilisée dans le cas présent, notamment en l’absence de menace envers l’ancienne structure et parce que le MTQ assure sa restauration conformément à l’orientation ministérielle sur l’identification et la gestion des ponts à valeur patrimoniale », peut-on lire dans un courriel daté du 12 avril 2023.

Selon des rapports de rencontre entre la Municipalité et le MTQ, une entente serait survenue avec l’ancienne mairesse Raymonde Plamondon voulant que le pont du rang de l’Égypte soit reconstruit selon les normes actuelles. En contrepartie, le pont Paré aurait été simplement réparé pour conserver sa valeur patrimoniale. Sauf qu’à Saint-Valérien-de-Milton, on ne retrouve aucune trace de cette entente ni d’une résolution.

« La mairesse n’a pas le pouvoir de conclure cette entente. Une Municipalité parle par résolution. Il n’y en a pas », martèle le maire de Saint-Valérien-de-Milton, Daniel Paquette.

Le député de Johnson André Lamontagne n’a pas voulu prendre position dans le dossier. « Il y a plusieurs variables comme la municipalité, la MRC, le MTQ et le ministère de la Culture. Je prends acte dans un premier temps [du dossier]. Mon travail en tant que député est d’accompagner la municipalité, mais si c’était un dossier simple, ça ferait longtemps que ce serait réglé. »

Un texte de Sarah-Eve Charland.

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