C’est sur sa page Facebook que M. Lacharité a officiellement annoncé son retrait immédiat de la vie politique municipale. Il a profité de cette plateforme pour illustrer brièvement les raisons qui l’ont poussé à prendre cette décision. « Les dernières semaines ont été particulièrement lourdes pour moi, mais surtout pour ma famille. Que des citoyens soient en désaccord avec une décision du conseil, c’est une chose, mais qu’ils intimident et menacent directement et indirectement ma famille, c’est inadmissible. La limite a été dépassée et ma décision est irrévocable », peut-on lire dans la publication.
En entrevue avec LA PENSÉE, l’ancien élu a détaillé l’intimidation qu’il a subie. Les insultes et les menaces ont été proférées en personne et via les médias sociaux, par messages privés Messenger et via des publications Facebook, entre le 12 et le 21 mars. Cela correspond exactement à la semaine durant laquelle la décision d’adhérer au Service de sécurité incendie de Drummondville a été prise.
« Ce sont tous des citoyens de Wickham qui ont agi ainsi et ce ne sont pas des pompiers. Plusieurs cas seront analysés par la SQ et elle décidera ensuite lesquels elle retiendra », a expliqué Ian Lacharité.
Il déplore que son parcours comme maire se soit terminé ainsi, car il aimait occuper ce poste. « Ça ne m’a jamais pesé d’être maire. Je l’ai toujours fait avec mon cœur. Toutefois, désormais, la politique, c’est terminé pour un bon bout de temps », a-t-il confié ne voulant toutefois pas fermer la porte définitivement à une implication politique.
Le maire démissionnaire n’a pas pu toucher à une indemnité de transition, car le conseil n’avait jamais voté pour en créer une comparativement à d’autres municipalités. Cet enjeu n’a toutefois pas influencé sa décision. « Dans les circonstances, je préfère que tout soit déjà terminé. Ma famille est bien heureuse que le dossier soit clos. Nous en profitons pour passer du bon temps ensemble et je continue à travailler à temps plein pour Sollio Agriculture », a-t-il affirmé serein.
Avenir du conseil
Avare de commentaires au moment de mettre sous presse, le conseiller municipal du district 4 à la Municipalité de Wickham, Charles-Antoine Fauteux, a tout de même confirmé à LA PENSÉE que le conseil municipal tiendra des élections pour remplacer M. Lacharité. En attendant, un maire par intérim, qui sera choisi parmi les six conseillers municipaux, sera nommé au courant de la semaine. La séance du conseil figure toujours à l’agenda le 3 avril à compter de 20 h à la salle du conseil. Selon Ian lacharité, il n’y a pas eu d’autres démissions au sein du conseil. De son côté, l’ex-maire a d’ailleurs réitéré son message contenu dans son annonce de démission.
« Depuis un certain temps, les orientations du conseil et mes valeurs personnelles prennent des routes différentes. Dans ce contexte, j’invite tous les conseillers et les conseillères ainsi que la prochaine personne qui agira à titre de maire à faire en sorte de ramener l’unité au sein de l’ensemble des Wickhamois. Je continue de prôner que la municipalité de Wickham est un magnifique endroit où il fait bon vivre », avait-il écrit.
Il a toutefois précisé de vive voix que ce n’était pas pour tous les dossiers que sa position différait de celle du conseil. Sans vouloir trop s’avancer concernant celui du Service incendie, il a interprété que le vote à l’unanimité du conseil en faveur de l’adhésion au service de Drummondville signifiait que les autres élus désiraient une transition rapidement. Pour sa part, il aurait probablement voulu attendre un peu plus avant que la Municipalité fasse le saut officiellement. C’est d’ailleurs ce qu’il sous-entendait dans son communiqué lorsqu’il indiquait laisser à son successeur la responsabilité de signer l’entente officielle avec Drummondville.
La SQ bien outillée
La SQ de Drummondville a confirmé qu’une plainte a été déposée par M. Lacharité vendredi dernier dans le cadre du Plan de lutte à l’intimidation des élus (PLI-ÉLUS) mis en place par l’organisation. L’objectif de ce plan est de lutter contre l’intimidation et la violence et de maintenir l’intégrité physique et morale des administrateurs publics, incluant les maires et les gestionnaires municipaux, lors de leur prise de décision ainsi que de sauvegarder le principe démocratique.
Le mécanisme d’application du PLI-Élus se fait en trois étapes. D’abord, les policiers reçoivent la plainte de l’élu concernant une situation d’intimidation. Ensuite, le dossier est analysé afin de savoir s’il peut être traité dans le cadre du Plan. Si c’est le cas, il est alors traité. Des mesures de protection sont également mises en place et les dossiers des personnes concernées peuvent être transférés aux services d’enquêtes au besoin. En tout temps durant le processus, le coordonnateur du PLI-Élus peut être consulté afin d’apporter le soutien requis aux policiers.
La MRC de Drummond et la FQM dénoncent l’intimidation
Le jour même où l’ancien maire est allé porter plainte, le 24 mars, la MRC de Drummond a tenu une conférence de presse afin de clamer haut et fort sa désapprobation face à l’intimidation.
« Trop, c’est trop. La démission du maire de Wickham en raison de l’intimidation dont il a été victime dans sa municipalité, c’est la goutte qui fait déborder le vase. Personne, quelle qu’elle soit, ne devrait avoir à subir de telles représailles, encore moins quand on parle de gens qui se dévouent corps et âme pour le bien de leur communauté. Je n’en reviens pas que nous devions appeler publiquement à plus de civisme de la part de notre population, mais de l’intimidation, il s’en produit aux quatre coins de notre MRC. Ce n’est probablement pas pire qu’ailleurs, mais, chose certaine, ce n’est plus tolérable, et il faut dénoncer cette situation », a déclaré la préfète de la MRC et mairesse de Drummondville, Stéphanie Lacoste. Elle était accompagnée de nombreux élus.
Mme Lacoste a tenu à souligner que ce ne sont pas les critiques le problème, mais bien les insultes et les menaces. « La liberté d’expression, on l’encourage. Ce qu’on veut, c’est dialoguer avec nos citoyens, débattre de points de vue, expliquer les raisons qui nous incitent à prendre des décisions pour le bien commun. Bref, on souhaite favoriser une saine démocratie. Mais il faut que ça se fasse dans le respect! Quand c’est rendu que des élus craignent pour leur sécurité, on a un gros problème. Échanger, consulter, écouter, oui; se faire insulter, non », a-t-elle affirmé en rappelant que le nombre d’élus démissionnaires au Québec est en hausse vertigineuse.
Pour sa part, la Fédération québécoise des municipalités (FQM) a annoncé lors de cette conférence de presse qu’un chantier sur l’intimidation sera lancé via sa commission permanente Développement social et communautaire, culturel et démocratie et que des pistes d’actions en naîtront. De plus, la FQM a indiqué être en discussion avec la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, et que des annonces suivront dans les prochaines semaines.